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Bailleur non propriétaire du bien

Un bailleur non propriétaire d’un bien peut-il en consentir une location ?

S’il faut être propriétaire de la chose pour pouvoir en transférer la propriété, il suffit en revanche d’être possesseur de la chose pour en concéder la jouissance.

Ainsi s’explique que le bail de la chose d’autrui soit considéré, par la doctrine (COLLART-DUTILLEUL, DELEBECQUE, MALAURIE, AYNES et GAUTIER) et la jurisprudence (Civ. 17 mai 1927 ; Civ. 3ème, 9 janvier 2001), comme un bail valable entre les parties, « en l’absence de trouble de jouissance du bien loué » (Civ. 3ème, 7 octobre 1998, n° 96-20.409 ; Civ. 3ème 2 février 2010, n°08-11.233).

L’acquisition de la propriété demeure donc sans conséquence sur le régime des parties contractantes du bail en cours.

Si la jouissance du preneur est troublée par ce défaut de propriété du bailleur, le preneur peut engager sa responsabilité civile contractuelle.

En vertu de l’article 1713 du code civil, le bail de la chose d’autrui n’est donc pas nul, mais simplement inopposable au propriétaire (Civ., 3ème, 19 avril 2000, n° 98-18.453). Le véritable propriétaire peut donc évincer le preneur à tout moment, sauf à invoquer l’apparence (Civ. 1ère, 2 novembre 1959 ; Civ. 3ème 21 novembre 1981).

Le bail produit alors ses effets entre le bailleur et le preneur tant que celui-ci a la jouissance paisible des lieux (Civ. 3ème 7 octobre 1998 n° 96-20.409) ou n’en a pas la jouissance troublée par le véritable propriétaire (Civ. 3ème, 24 janvier 2001, n°99-14.426 ; Civ. 3ème, 2 février 2010, n°08-11.233).

La jurisprudence a d’ailleurs estimé qu’à la différence de la vente de la chose d’autrui, le bail de la chose d’autrui, en lui-même, n’est pas inefficace car rien n’interdit de s’engager à procurer la jouissance du bien d’autrui (Civ. 3ème, 13 février 1985, n° 82-14.220).

En l’espèce, le concessionnaire peut donc facturer la location d’un bien au consommateur final alors même que ce bien appartient au fabricant.

Toutefois, cette faculté pour le bailleur connait certaines limitations.

Aux termes de l’article 1877 du code civil, le prêteur demeure propriétaire de la chose prêtée.

L’emprunteur n’en a donc que la détention (BAUDRY-LACANTINERIE et WAHL, t.23, n°676).

Il doit veiller à la garde de la chose prêtée et ne peut s’en servir qu’à un usage déterminé (article 1880 à 1887 du code civil).

De surcroit, il est responsable de la détérioration ou de la perte de la chose et des dommages qu’elle peut occasionner (article 1880 et 1881).

Selon l’article 1882 du code civil, l’emprunteur sera tenu de la perte de la chose survenue par cas fortuit, lorsqu’il « aurait pu la garantir en employant la sienne propre, ou si, ne pouvant conserver que l’une des deux, il a préféré la sienne ».

Ainsi, l’emprunteur est tenu d’une obligation de moyen touchant la conservation de la chose (article 180 du code civil) et d’une obligation de résultat quant à sa restitution (Cass. 1ère civ., 29 avril 1985, n° 84-13.286, bull. civ. I, n° 133).

L’obligation de restituer la chose empruntée en temps convenu, mise à la charge de l’emprunteur, en vertu de l’article 1875 du code civil, est « l’essence même du commodat » (Cass. 1ere, 29 janvier 1877). L’obligation de restituer la chose dans l’état où elle se trouve est une obligation de résultat (MAZEAUD et CHABAS, t.2, er vol., n°469). L’emprunteur engage sa responsabilité au cas où il ne livre pas la chose au jour et lieu convenus. Pour se libérer, il lui faudrait établir qu’une cause étrangère a été à l’origine de la perte ou du retard.

Lorsque le préteur fait résilier le contrat parce que l’emprunteur a fait un usage excessif de la chose, il sera tenu de payer les dommages-intérêts au prêteur dans la mesure du préjudice subi par celui-ci.

Enfin, en cas de non-respect de ses obligations par l’emprunteur, la jurisprudence tend à permettre au préteur de demander la résolution du contrat quand l’emprunteur cesse d’exécuter ses obligations. Ainsi, lorsqu’un emprunteur ne se conforme pas au tableau d’amortissement prévu (Cass., civ., 2 février 1887) ou à certaines obligations accessoires garantissant l’emprunt ; qu’il néglige ou refuse de payer les intérêts (CA Paris, 29 juin 1893), ou lorsqu’il ne se conforme pas à un emploi imposé dans l’acte de prêt (CA Amiens, 28 janvier 1892).

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